Les Nouvelles Publications : La FNH (Fédération nationale de l'habillement) est le seul syndicat patronal représentatif des commerçants indépendants. En tant que présidente de la fédération Paca, comment va le moral de vos adhérents dans la région ?
Caroline Baron : Plutôt bien ! La fédération nationale de l’habillement représente en Paca 3 700 commerces de l’habillement (femme, homme, enfant). Qu’ils soient franchisés ou pas, tous sont indépendants. Notre modèle économique n’a rien à voir avec celui des grosses enseignes. Nous sommes bien plus agiles et la crise sanitaire a totalement modifié notre rapport non seulement avec nos clients, mais aussi avec les marques.
En quoi y a-t-il un avant et un après la pandémie ?
Tous les commerçants ont renoué un lien direct avec leurs clients. Que ce soit via les réseaux sociaux, le click and collect bien plus généralisé, des animations… mais au-delà de ce lien que nous avons renoué, l’achat client s’est totalement modifié. Il veut du sens, de la qualité, savoir où sont fabriqués ses vêtements... la mode change très vite aussi. De plus en plus vite.
Qu’est-ce qui fait la différence selon vous avec la filière textile côté industrie ?
Contrairement aux grandes marques qui pensent leur collection plus d’un an à l’avance, nous faisons nos achats à J-6 mois. Nous savons qu’il faut aussi proposer tout le temps de la nouveauté, via des collections capsules par exemple. Mais aussi de l’exclusivité, du choix. Le client se montre de plus en plus exigeant. A nous de nous montrer souple, pour nous adapter à ses attentes. Aujourd’hui, l’expérience "client" dans les boutiques de mode est poussée à l’extrême.
Avec les marques, en quoi avez-vous remarqué de nouveaux comportements vis-à-vis de vous, les boutiques, leurs acheteurs ?
Depuis la fin de la crise sanitaire, la fédération a créé des commissions qui échangent directement avec les marques textiles. Nous leur faisons remonter nos remarques "terrain". L’importance du sourcing, de la traçabilité des matières par exemple. On ne peut plus travailler de façon déconnectée de la réalité que l’on vit tous les jours, dans nos commerces. C’est je pense ce qui fait la force du commerce indépendant.
La tendance de la seconde main ne cesse de gagner des parts de marché. Est-ce un concurrent sérieux pour le commerce de proximité ?
Je trouve ça très bien que l’on donne une nouvelle vie à ses vêtements. C’est juste parfait de vider ses placards et de se séparer de l’inutile. C’est une tendance de fond assez récente, qui reste complémentaire de l’offre textile des commerces indépendants. Puisque nous sommes surtout ici sur des produits haut de gamme, voire de luxe. Ce qui n’est pas le cas de la majorité des boutiques de prêt-à-porter.
La crise liée au pouvoir d’achat vous aurait-elle épargnés ?
Les boutiques de mode ont vécu ces dernières années de nombreuses crises. La crise des gilets jaunes a fortement impacté l’économie des centres-villes. Durant le Covid, considérées comme non essentielles, nous avons été obligées de développer des armes, qui jusque-là était réservées aux grands groupes. Nous sommes devenus des communiquant incroyables, des directeurs de marketing… En même temps, nous avons resserré les liens avec nos fournisseurs, désormais de véritables partenaires.
Marseille : Kaporal demande son placement en redressement judiciaire
Plus réactifs que les grands groupes, vous avez su vous adapter à cette nouvelle donne…
Paradoxalement, en même temps que nous nous fragilisions, nous avons gagné en force. Tant auprès de nos clients, que de nos fournisseurs. Les indépendants tendent davantage vers la qualité, car ces boutiques sont le plus souvent dirigées par des passionnés du produit et de la relation humaine. Ces atouts sont notre botte secrète. C’est pour ça que je voudrais remplacer cette notion de "luxe", par la notion de "qualité", qui en période de crise, est un des éléments essentiels qui fait que le consommateur ne lâche pas "sa" boutique !