Dans les secteurs d’activités concurrentiels et/ou de l’innovation, il est primordial pour l’entreprise de préserver son patrimoine matériel et immatériel. La clause de non-concurrence va avoir pour rôle de protéger l’entreprise d’actes de concurrence de la part d’un ancien employé, qui utiliserait les connaissances ou savoir-faire spécifiques acquis au cours de l’exécution de son contrat de travail au bénéfice d’une entreprise concurrente.
Ces clauses sont ainsi très régulièrement utilisées dans les contrats de travail des startups et souvent réclamées par les investisseurs entrant au capital de celles-ci.
Leur singularité résulte de ce qu’elles voient s’affronter en leur sein d’une part le droit économique pour l’entreprise de se prémunir d’acte de concurrence déloyale, et d’autre part le principe de la liberté du travail. La clause de non-concurrence n’est pas définie par la loi, mais a fait l’objet d’une construction jurisprudentielle au fil de décisions de justice successives.
Cette clause a été très encadrée par les juges qui en ont dessiné des contours stricts. Ainsi pour être valable la clause est soumise à nombre de conditions impératives et cumulatives : elle doit être légitimée par les intérêts de l’entreprise, limitée dans le temps et dans l’espace, comporter une contrepartie financière, et ne pas apporter une restriction trop importante à la liberté de travailler du salarié.
Elle va comporter des critères objectifs et facilement identifiables comme l’étendue géographique ou temporelle, mais pourra être sujette à interprétation quant aux éléments plus subjectifs qui la composent comme l’intérêt de l’entreprise ou l’atteinte aux droits du salarié.
Sa rédaction comme son usage vont donc devoir faire l’objet d’un soin minutieux : en effet son principe devra être prévu soit par la convention collective qui va en fixer les contours, plus ou moins strictement selon les cas, soit par le contrat de travail, qui, à défaut de dispositions conventionnelles impératives, en déterminera les conditions.
L’employeur qui souhaite insérer une telle clause au contrat de travail va donc devoir veiller à une rédaction précise s’il veut s’assurer de son efficacité, mais être également attentif à son coût, lié à la contrepartie financière obligatoirement prévue.
Sa généralisation voire sa banalisation dans les rapports contractuels, notamment dans les sociétés innovantes, conduit souvent à des situations critiques : en effet, cette clause, qui prend effet au départ du salarié, est souvent négligée ou oubliée ; or elle n’est nullement "en sommeil" mais trouve application automatiquement à la rupture du contrat, quelle qu’en soit la cause ou l’époque, comme par exemple une démission ou la rupture de la période d’essai. Ce qui de facto entraîne l’obligation de versement de la contrepartie financière.
Or tous les emplois ne nécessitent pas de protection spécifique ou encore toutes les entreprises ne peuvent ou ne veulent pas supporter le coût d’une contrepartie financière au regard du risque de concurrence réellement encouru.
Il est donc vivement conseillé aux entreprises – outre la nécessité d’apporter une attention particulière à ses conditions de validité – de bien mesurer dès la conclusion du contrat de travail la nécessité d’insérer une telle clause au regard des fonctions occupées, d’adapter éventuellement ses conditions, notamment de durée, afin d’en maîtriser le coût et de prévoir la possibilité d’y renoncer. Ce dernier point est déterminant car nombre d’employeurs préfèrent renoncer à une clause qu’ils jugent trop onéreuse, plutôt que de se prémunir d’éventuels actes de concurrence.
Enfin, au-delà de cet usage raisonné de la clause de non-concurrence, il peut être recommandé de ne pas l’utiliser quand les circonstances ne le justifient pas.