Exposer le bilan et les perspectives des activités d’un groupe tel qu’Esso SAF dans une situation française aussi perturbée qu’en ce moment n’est pas chose aisée. Mais Charles Amyot, son PDG, s’est livré à l’exercice ce 23 mars 2023. En soulignant toutes les incertitudes géopolitiques, réglementaires, fiscales, environnementales, tant nationales qu’internationales, qui affectent les marchés de l’entreprise mais aussi son « optimisme sur la capacité européenne et française pour évoluer ». Il a d’ailleurs voulu se montrer pleinement rassurant pour la raffinerie de Fos-sur-Mer, secouée par un mouvement social l’automne dernier et encore impactée par les effets des blocages sur l’approvisionnement ou l’expédition de produits même si sa production se poursuit actuellement.
En 2022, cette unité a traité 5,2 millions de tonnes de pétrole brut sur les 14,8 millions de tonnes issues des installations d’Esso France, un volume global en baisse de 3 % par rapport à 2021. « Cette raffinerie est sujette à de nombreuses questions sur son avenir, mais elle est toujours là, elle a montré sa capacité d’adaptation, elle est résiliente, explique le dirigeant. Si elle produit essentiellement des carburants routiers, la France importe 50 % de son diesel, à peu près 25 millions de tonnes. Avec l’embargo sur le pétrole russe, ce sont autant d’opportunités pour cette unité de contribuer à assurer la souveraineté d’approvisionnement du pays dans une période critique ».

Charles Amyot avait annoncé l’an dernier, à la même période, qu’une augmentation des investissements serait engagée en 2023 sur la raffinerie. En 2022, ils avaient été estimés à 5 millions d’euros. Il planifie en 2023 une somme de 11 millions d’euros, sans préciser les transformations qui seraient engagées. « Début 2024, Fos sera soumise à un grand arrêt réglementaire dont la préparation a commencé. Notre objectif prioritaire est de le réussir, comme nous l’avons fait sur la raffinerie de Gravenchon, dans un budget et un délai de classe mondiale ».
Esso va investir 5 millions d’euros en 2022 à Fos-sur-Mer
Privilégier l’efficacité sur le dogmatisme
En 2022, Esso qui emploie 1 500 salariés a réalisé un chiffre d’affaires de 25 milliards d’euros et investi 41 millions d’euros sur ses activités (19 réalisés + 22 capitalisés pour des arrêts planifiés). Sa production s’est élevée à 12 millions de tonnes de produits énergétiques (essence, gazole, fiouls domestiques, carburéacteurs, carburants marine), 2,4 millions de tonnes de produits de spécialités (paraffines, huiles, bitumes…) et 144 milliers de m3 de lubrifiants finis.
ArcelorMittal Méditerranée pose les jalons d’une production décarbonée à Fos-sur-Mer
En 2023, le groupe veut à la fois renforcer son niveau d’excellence et sa compétitivitétout en accélérant son processus de décarbonation dans sa manière de produire et sur les produits qu’il commercialise. Mais Charles Amyot réclame aux institutions françaises et européennes des positions moins dogmatiques pour faciliter ces mutations. Les 119 millions d’euros qu’il provisionne pour la « contribution exceptionnelle de solidarité » est assimilée, à ses yeux, à une « taxe déguisée sur les super-profits ». Il juge qu’elle fait peser une menace sur les choix futurs d’ExxonMobil. « Changer les règles du jeu alors qu’on est en train de jouer, c’est autant de cash qui ne sera pas converti en termes d’investissement sur la souveraineté ou la transition énergétique sur le continent européen. 17 milliards sont sur la table pour le groupe. Nous sommes en concurrence avec d’autres sites affiliés ExxonMobil, l’Europe est loin du compte pour attirer ces investissements », dit-il. Il réclame de la lisibilité et de la stabilité, en soulignant la simplicité et l’efficacité "incitative" du dispositif de l’Inflation Reduction Act américain (IRA).
Réforme des retraites : la réquisition du dépôt pétrolier de Fos-sur-Mer prorogée