« Je suis artisan avant d’être élu. L’artisanat participe à l’attractivité mais aussi au bien vivre. Il faut le préserver », argue Yannick Mazette, le Président de la Chambre des métiers et de l’artisanat de Provence-Alpes-Côte d'Azur en préambule de sa conférence de presse de rentrée. Maître artisan boulanger dans le Vaucluse, le président, aux commandes de la Chambre de métiers et de l’artisanat depuis novembre 2021 n’a pas manqué de faire valoir le dynamisme de l’organisation, malgré un contexte économique défavorable.
La hausse du coût de l’énergie affaiblit les artisans
217 256, c’est le nombre d’entreprises artisanales que comptait la région Provence Alpes Côte d’Azur au 1er janvier 2023, soit 17 000 entreprises de plus en un an. C’est 8,5 % d’augmentation. Un chiffre en hausse, qui cache une enquête de conjoncture, moins optimiste pour la profession. « Mais la force de l’artisanat réside aussi dans sa résilience », tient à rassurer Alexis Kotenko, le directeur régional de l’Ingénierie de l’offre de la CMA. Sur les 1 686 chefs d’entreprise interrogés, 53 % jugent leur activité insuffisante.
En cause ? La hausse du coût des matières premières. En perte de visibilité, avec de plus en plus de difficultés pour se projeter, seulement 1 artisan sur 5 prévoit une hausse de son activité dans les six prochains mois. Une enveloppe du Conseil régional, afin d’aider les artisans confrontés à la hausse du coût de l’énergie, a déjà bénéficié à 250 entreprises en difficulté. « Le reste permettra d’aider ces entreprises au premier trimestre de l’année prochaine, moment où l’énergie est la plus chère », précise le président.
Problématiques de recrutement
A l’inflation s’ajoutent les problématiques de recrutements qui concernent 75 % des 36 % des artisans qui cherchent à embaucher. « C’est pourquoi le sujet de la formation est primordial », insiste Yannick Mazette, avant d’annoncer qu’un huitième campus de formation verra bientôt le jour dans la région, à Saint-Laurent-du Var. Préserver l’artisanat c’est former les talents de demain. Et la CMA en forme actuellement 6 200, répartis dans 120 formations allant du CAP au Bac + 5.
Les formations des artisans en péril ?
Seulement voilà, la CMA doit faire face à deux mauvaises nouvelles, tombées comme un couperet cet été : une baisse des prises en charge des contrats par l’Etat, qui découle du projet de loi Finance 2024 et une hausse de la taxe de la Chambre des métiers et de l’artisanat. La réduction du financement public des contrats d’apprentissage pourrait mettre en péril des formations, notamment les CAP, et aussi l’objectif du million d’apprentis par an en 2027. « La qualité des formations pourraient aussi être fortement impactés. Si ne pouvons plus offrir de formations de qualité comment peut-on répondre aux problématiques de manque d’artisans ? », s’interroge l’artisan boulanger.
Plusieurs centres de formations risquent de fermer leur porte. Dans le Var, par exemple, « le CAP Ferronnerie d’art situé dans la commune des Arcs, dans le Var, pourrait ne pas être maintenu mais quid de ces jeunes ? », s’indigne Alexis Kotenko. Certains artisans pourraient alors ne plus être formés à des métiers bien spécifiques, essentiels à la transmission des entreprises.
La contre-attaque de la CMA
Pour minimiser l’impact des décisions étatiques, la CMA Paca prévoit de monter en pool financier pour assurer l’accompagnement des transmissions. « Ce sera une première qui devrait voir le jour à l’horizon 2030. Le pool de financement aidera au rachat des entreprises », indique Yannick Mazette. Et alors que les métiers de l’artisanat ne cessent d’évoluer, la CMA se doit d’avoir le regard tourné vers les métiers de la décarbonation. Seulement, comment envisager ces changements et offrir un panel de formations cohérent avec les besoins de notre société sans investissement ?
Yannick Mazette rencontrera vendredi prochain, lors d’une table ronde exceptionnelle, Carole Grandjean, ministre du travail, du plein emploi et de la formation, afin de répondre à toutes ces questions. « On fera tout pour conserver notre réseau. On est mobilisé pour la jeunesse », conclut avec ferveur le président.