Ce 15 mars, à la villa Khariessa à Martigues, il émanait une saine atmosphère des tables rondes et échanges avec la salle organisés par le Secrétariat permanent pour la prévention des pollutions industrielles (SPPPI) de Provence-Alpes-Côte d’Azur pour retracer les travaux du dispositif "Réponses". Depuis plusieurs semaines, dans la rue, au Parlement ou sur les plateaux TV, les invectives et gestes inconvenants pullulent sur la réforme des retraites, laissant voir l’image d’une France qui se déchire et ne se respecte plus.
Malgré le côté hautement inflammable du sujet de la lutte contre la pollution de l’air autour de l’étang de Berre et du Golfe de Fos, la réunion, avec plus d’une centaine de participants de tous horizons (institutions, industriels, associations, citoyens…), s’est déroulée dans l’écoute et la sérénité. Sans négliger les questions franches sur l’implantation de projets logistiques susceptibles d’accroître le nombre de poids lourds sur les routes ou sur les transformations espérées de la zone de Fos. Lancé fin 2019 pour recueillir les attentes des habitants sur la qualité de l’air (144 ont été recensées et synthétisées), "Réponses" s’est engagé dès 2020 sur un plan d’action qui démontre que parler, écouter et agir peut aider à progresser mieux qu’imposer ou s’opposer. Au 31 décembre 2022, le dispositif fait état de 216 réponses concrètes apportées aux attentes des citoyens, mais aussi de la diffusion sur le site www.dispositif-reponses.org de 69 "clés d’information" sur la pollution atmosphérique, les émissions industrielles, les impacts sur la santé, qui éclairent les sujets plus largement que des œillères.
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« L’an dernier, 12 nouvelles actions sont venues enrichir les 135 engagées à fin 2021, explique Gwénaëlle Hourdin, déléguée régionale du SPPPI qui coordonne avec son équipe les acteurs et les initiatives. Nous nous efforçons d’apporter des éléments de réponses à l’intégralité de la parole citoyenne exprimée. C’était notre engagement. En 2022, nous sommes partis à la rencontre de 258 personnes dont des publics éloignés traditionnellement de toutes les structures de concertation pour entendre leurs préoccupations. Et nous avons élargi le panel citoyen. »
« Nous avons vraiment le sentiment que les choses avancent, nous en sommes acteurs et nous essayons aussi d’orienter », confie l’un de ses membres, Mathieu Bernardini, résident de Martigues et père de famille. Sébastien Mathiot, chargé d’action territoriale d’Atmosud qui mesure la qualité de l’air en s’attachant à diffuser « une information accessible et digeste » atteste aussi des évolutions positives et du suivi. En 2023, l’étude "Scénarii" de 2017 sur les risques pour la santé de l’exposition des populations de 66 communes à 39 substances émises par les industries, les transports, les bâtiments ou les navires, entrera dans une phase d’actualisation.
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S’il souffre encore d’un manque de notoriété, seuls 11,6 % de personnes interrogées sur les 21 communes disant connaître le dispositif, "Réponses" n’entend pas ralentir quand se profilent des mutations autour de l’étang de Berre qui nécessitent d’approfondir le dialogue entre pouvoirs publics, industriels existants ou prospectés, associations, populations… Conviée à cette plénière, Corinne Ramombordes, présidente de l’association Piicto (qui regroupe une quarantaine d’industriels principalement de la zone de Fos-Etang de Berre, de collectivités, d’organisations professionnelles, pôles de compétitivité et le Grand Port Maritime de Marseille), a évoqué le programme Syrius, financé par l’Ademe et les industriels, sur les moyens collectifs à mettre en œuvre pour décarboner les zones industrielles, de Fos jusqu’à Gardanne. « Nous allons mener 30 études sur deux ans pour définir une feuille de route claire, adaptée, afin d’aboutir à des réalisations. C’est nouveau et unique que des industriels collaborent sur cet enjeu commun et crucial qu’est la décarbonation de leurs activités », indique-t-elle.
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Inspiré par les effets du dialogue instauré par "Réponses", le sous-préfet d’Istres, Régis Passerieux, s’emploie à l’élargir au-delà de la thématique "pollution de l’air" avec le "Laboratoire territorial industrie Fos-Berre", pour que naisse « une vision coconstruite et partagée à 2030-2040 » du devenir de l’industrie. Il la souhaite nourrie, discutée et approuvée autant par les pouvoirs publics que par les industriels, les élus, les citoyens, les associations et les scientifiques.
« Nous allons tout mettre sur la table et dire l’industrie qu’on veut et celle qu’on ne voudra plus sur ce territoire. Ce qui s’est fait voici 30 ou 40 ans, des projets industriels ou touristiques plaqués sur des espaces, n’est plus possible aujourd’hui, la société a beaucoup changé. Nous établirons un état des lieux, nous examinerons des scénarios et nous définirons ensemble, en toute transparence, une méthode, des outils et des indicateurs de pilotage. »
Le premier rendez-vous de ce "Lab" est fixé le 29 mars.
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