Les renforts commencent à arriver au Tribunal judiciaire de Marseille.Vingt nouveaux magistrats ont été installés le 30 septembre lors de l’audience solennelle de rentrée, qui s’est tenue dans la salle Pierre Michel. « Cette arrivée représente toujours un moment fort dans la vie d'un tribunal parce que ces nouveaux collègues vont permettre à une juridiction de s'enrichir d'expériences différentes et des pratiques innovantes », a évoqué Olivier Leurent, son président. Les renforts étaient attendus…
Crise de moyens au tribunal judiciaire de Marseille
Un effort historique
« Il y a deux ans nous avions tiré la sonnette d'alarme sur la situation catastrophique des effectifs de la juridiction au regard des enjeux auxquels le tribunal est confronté en raison de ses compétences interrégionales dans un grand nombre de contentieux », a rappelé le président du Tribunal. Au fil du temps, les stocks n'ont fait que croître et les délais d'audiencement se sont allongés. Aussi, une mission de l'Inspection générale de Justice a été diligentée afin d'objectiver la situation quant à la chaîne pénale. A la suite d'un travail considérable fourni par les services pénaux et le greffe, le constat d'un déficit de moyens a été partagé. L'annonce des renforts avaient été faite par Eric Dupond-Moretti, le ministre de la Justice lors de sa visite à Marseille en février 2021. « L'effort historique réalisé en faveur du tribunal de Marseille par le ministère de la Justice traduit la prise de conscience du rattrapage qu'il convenait d'opérer pour remettre à flot ce magnifique navire », a confié le président.
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De 113 à 133 magistrats
Les effectifs sont passés de 113 magistrats en juillet 2020 à 133 en septembre 2022. « Nous enregistrons ainsi vingt magistrats de plus en deux ans et nous espérons en avoir 136 en janvier prochain », a-t-il relevé. Aucune juridiction n'a connu une telle augmentation ces dernières années. « Dans un contexte d'insuffisance avérée de magistrats en France, évaluée à 1 500 par le rapport Sauve, cela traduit l'urgence absolue dans laquelle se trouvait le tribunal », a-t-il souligné.
C'est dans ce contexte qu'arrivent 32 nouveaux magistrats, ce qui, à la suite de 22 départs, constitue un solde positif de dix magistrats. « 32 sur 133, c'est un quart du siège qui a été renouvelé sur un seul mouvement, chiffre jamais atteint à Marseille. C'est le signe d'un renouveau mais aussi d'attractivité et de vitalité de la juridiction », a-t-il précisé. Ce mouvement est historique par son ampleur et leur origine. Quatre d'entre eux sont des auditeurs de justice issus de l'Ecole Nationale de la Magistrature et nommés au Tribunal de Marseille pour leur premier poste. « Notre tribunal n'avait jamais connu la chance de bénéficier de nominations à la sortie de l'Ecole que j'ai dirigée. Ce n'est pas sans émotion que je retrouve mes derniers auditeurs issus de la promotion 2020 », a-t-il évoqué.

Résorption des stocks
Le président a ensuite évoqué la venue de dix magistrats supplémentaires qui doit permettre la mise en place de différentes actions pour résorber le stock d'affaires. Les chambres correctionnelles spécialisées de grande délinquance organisée et en matière financière, la 6e Chambre et la 7e Chambre, se verront doublées afin d'absorber les dossiers les plus volumineux nécessitant plusieurs semaines d'audience comme les affaires Guedj, Millas ou prochainement Tatoo, tout en continuant les affaires plus classiques. La 11e chambre compétente en droit pénal général bénéficiera d'une audience supplémentaire par semaine pour juger les 200 procédures en attente d'audience. Il est également envisagé de créer une audience supplémentaire de comparution immédiate. Cette augmentation de la capacité de jugements ne peut aboutir que si le greffe est renforcé dans les mêmes proportions que les magistrats.
Manque de salles d'audience
Pour créer plus d'audiences, il est nécessaire de disposer de salles en nombre suffisant et adaptées au contentieux pénal. « La question immobilière qui ne peut se résoudre que par la construction d'une grande cité judicaire moderne sera au cœur de nos préoccupations dans les prochains mois », a-t-il précisé. La réorganisation du service d'instruction permet de renforcer la section JIRS, spécialisée en matière de criminalité organisée, en passant de quatre à sept cabinets qui centraliseront l'ensemble des procédures JIRS. Les sept magistrats instructeurs auront ainsi 30 dossiers par cabinet, ce qui correspond à la moyenne nationale. La section du néobanditisme, chargée du trafic de produits stupéfiants, rejoint la section générale tout en conservant sa spécialisation. L'objectif est que chaque cabinet généraliste ne dépasse pas 100 procédures là ou certains en étaient à 180 et que les cabinets spécialisés en matière de trafic de produits stupéfiants avoisinent les 60 dossiers. Ces renforts ont nécessité une réorganisation de la répartition des bureaux et une densification de leur occupation.
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Cette rentrée est également marquée par la mise en place d'un partenariat avec AMU et plus particulièrement l'Institut d'Etudes Judiciaires. Cette audience solennelle revêt un caractère singulier puisque c'est la dernière pour Jean-Raphaël Fernandez en tant que bâtonnier en exercice. Le Président l'a remercié pour son sens du dialogue et de la concertation au service d'une justice de qualité.